Jean-Paul FITOUSSI
Economiste, Président de l'Observatoire Français des Conjonctures Economiques (OFCE)

 

 

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La politique de l'impuissance
Jean-Paul Fitoussi
Entretien avec Jean-Claude Guillebaud
Éditions Arléa

Nous vivons, en Europe, un paradoxe singulier : l’ouverture des frontières y est perçue comme un surcroît de contraintes. La mondialisation est ressentie comme un enfermement disciplinaire. Toute reforme sociale est vécue comme l'annonce d'une régression. Pire encore : ce qui est mis en doute, c'est la capacité d'action des décideurs politiques. Ce qui paraît profondément en crise, c'est la démocratie elle-même et la possibilité pour les peuples de choisir leur avenir. Nos sociétés paraissent minées par un sentiment de précarité, d'insécurité, de souffrance sociale.
Que nous arrive-t-il ? Comment expliquer ce désenchantement, plus dangereux à terme qu'on ne l'imagine ? Sur quoi se fonde cette insidieuse résignation ? Dans ces pages dérangeantes,-Jean-Paul Fitoussi incrimine ce qu'il appelle la « politique de l'impuissance ». Il explique de quelle façon - et avec quelle folie ! - la plupart des dirigeants européens s'accommodent d'une croissance faible et d'un chômage de masse, alors même que ces deux questions justifieraient une tout autre politique. Dans cette libre conversation avec Jean-Claude Guillebaud, il montre comment responsables et commentateurs donnent l'impression de courir derrière un « modèle » qui n'existe nulle part dans le monde. Sur les grands débats du moment, l'un des meilleurs économistes européens s'efforce ici de parler sans détour.

 

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Jean Paul FITOUSSI
  LA POLITIQUE DE L'IMPUISSANCE

 

 « Les instruments traditionnels de la gestion macro-économique sont soit inexistants soit empêchés. De ce fait, les ajustements des économies nationales ne peuvent se faire que par des variations de prix et de coûts relatifs. D’où l’insistance des autorités monétaires et de la Commission sur la suppression des obstacles à la concurrence et les nécessaires réformes structurelles au risque de voir les inégalités se creuser davantage, les services publics et la protection sociale se réduire comme peau de chagrin. » 

« La logique actuelle de la constitution économique de l’Europe crée ainsi une dynamique « objective » d’évolution vers une économie de plus en plus libérale, portée par des institutions qui ne peuvent choisir une autre direction. Leur seul pouvoir est celui d’accroître l’intensité de la concurrence dans le marché unique, non de la réduire. Mais est-ce bien ce que souhaitent aujourd’hui majoritairement les citoyens des démocraties européennes ? Et si tel est le cas, est-ce que demain des choix différents pourront être faits ? » (page 72)  

« Moins-disant social et moins-disant fiscal. C’est la dynamique où se joue l’avenir de l’Union européenne car c’est la seule dynamique que peuvent contrôler les gouvernements nationaux. Pourtant, rien n’est moins assuré que le bénéfice supposé de la concurrence fiscale et sociale. En réduisant les recettes de l’Etat, elle amoindrit leur capacité à fournir les biens publics essentiels pour la croissance et le développement : santé, éducation, recherche, infrastructures, cohésion nationale… A terme, elle est donc une stratégie perdante qui réduit le potentiel de croissance des nations. »  (pages 101 et 102) 

« L’Europe puissance, maître de son destin, capable d’imposer son modèle social au reste du monde était la promesse qui nous fût faite au moment du Traité de Maastricht et nous est toujours faite à chaque nouvelle étape de la construction européenne. Ne nous dit-on pas aujourd’hui que l’adoption du projet de Constitution est d’autant plus nécessaire qu’il convient de rééquilibrer les pouvoirs régionaux et de compenser l’hyperpuissance américaine par l’émergence d’une puissance européenne ?  

Mais nous ne prenons pas le chemin de cet avenir, même s’il est à portée de volonté. Il faudrait pour cela aller résolument vers la construction d’une démocratie européenne. Il faudrait que l’Europe soit gouvernée politiquement. Est-il raisonnable que notre région soit la seule à ne pas l’être ? Comment pourrait-elle construire une stratégie de puissance, ne serait-ce qu’économique, dans ce vide de souveraineté ? »    page 82

« On finit par construire des institutions qui rendent toute alternative quasiment impossible. »  

L’Europe, l’Europe, l’Europe ! même au prix de la démocratie. Etrangement, ceux qui souhaitent l’Europe et la démocratie sont qualifiés d’anti-européens alors qu’on sait que, sur le long terme, l’absence de démocratie ne peut aboutir qu’à la destruction de l’Europe. » 

 

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L’état de l'Union européenne
Sous la direction de Jean-Paul Fitoussi et Jacques Le Cacheux
Fayard / Presses de Sciences Po

La Constitution européenne est une photographie de l’état de l’Union. Au terme de près de deux années de débats, quels remèdes, rassemblés dans ce texte aujourd’hui soumis à l’approbation des peuples, propose-t-elle pour apaiser la quadruple crise, de confiance, de croissance, des inégalités et de l’unité dont souffre l’Union ?
Comme on le verra dans les contributions rassemblées ici, qui analysent sa situation conjoncturelle et ses politiques économiques, ses institutions et ses normes sociales, sa cohésion et ses élargissements (dont celui, éventuel, à la Turquie) et la perspective d’une Europe politique, la plupart paraissent bien timides et certains sont inadaptés. Mais une divergence sur la nature ou l’ampleur du mal politique est toujours admissible entre Européens convaincus. Ce qui inquiète, dans le texte du traité constitutionnel européen, c’est qu’en cristallisant le gouvernement économique de l’Europe, il risque de transmettre aux générations futures nos crises en même temps que l’incapacité de les résoudre. Que faudrait-il faire pour rendre l’avenir politique européen de nouveau possible ? Comment éviter de confronter les citoyens au choix de Sophie, entre la démocratie et l’Europe ? C’est à ces questions que nous tentons d’apporter une réponse.
Cet ouvrage est issu des travaux conduits, au sein de l’OFCE, par un groupe de réflexion animé par Jean-Paul Fitoussi et Jacques Le Cacheux, auquel ont participé Louis Chauvel, Jérôme Creel, Gérard Grunberg, Günesh Kamber, Éloi Laurent et Sandrine Levasseur.