Cercle d'Etude de Réformes Féministes

 

Face aux obscurantismes (l'islamiste et les autres) : le Devoir de Liberté

 

 

 

DOUNIA BOUZAR

L'ISLAM DES BANLIEUES

LES PREDICATEURS MUSULMANS : NOUVEAUX TRAVAILLEURS SOCIAUX ?[1]

 

 

Dounia Bouzar est éducatrice à la Protection judiciaire de la jeunesse.

 

Son livre est un éloge de Tariq Ramadan et Hassan Iquioussen, qu'elle qualifie de "prédicateurs musulmans", et un plaidoyer en faveur de leur action de "travail social" auprès des jeunes.

A la lire, il semble logique que les seuls "travailleurs sociaux" aptes à aider les jeunes issus de l'immigration "musulmane", soient ces islamistes "réformateurs" et leurs émules...

 

D'après Dounia Bouzar les cassettes de ces deux prêcheurs, éditées par les éditions Tawhid, se vendraient à cent mille exemplaires par an. "Que trouvent certains de nos jeunes dans leurs discours alors qu'ils n'écoutent plus personne ?" demande-t-elle.

Douania Bouzar cite les données d'un sondage du Monde du 16 octobre 1994, pour expliquer que "la revendication identitaire chez les jeunes de16-24 ans est plus importante que chez les 25-34 ans : 24% (contre 38% ne font pas le ramadan, 21% (contre 12%) estiment que les musulmans doivent bénéficier d'un statut propre à leur religion, 34% (contre 23%) approuvent l'idée d'un appel à la prière par hauts parleurs...

 

Dounia Bouzar décrit les jeunes et leurs familles comme réfractaires à ce qui n'est pas, (comment dire ?), "eux-mêmes". Elle décrit les familles comme accrochées à des traditions qui ne sont pas dues à la religion. Les familles n'acceptant pas l'intervention de travailleurs sociaux non musulmans par refus de perdre leur identité, la seule intervention possible serait donc celle des prêcheurs, qui eux, peuvent leur expliquer comment s'adapter aux besoins actuels de leurs enfants tout en restant dans la religion. (Selon les thèses exposées par Tariq Ramadan en effet, -voir ci dessus - les variations permises par le coran permettent la modernisation). En même temps, ils donneraient aux jeunes une identité.

 

Jamais Dounia Bouzar ne remet en cause la fermeture des familles aux idées des travailleurs sociaux non musulmans.  Ni la morale inculquée aux jeunes par ces prêcheurs.

Au contraire, elle loue leurs idées, et met en garde contre la diffusion des idées de droits de l'individu et de laïcité. Pour elle, face à une population non individualiste, un discours concernant l'individu ne peut être ressenti que comme une agression, qui soudera le groupe contre le travailleur social. Quant aux signes religieux, elle nous annonce que si nous demandons aux jeunes de ne pas les porter, ils se sentiront rejetés comme intégristes, et par réaction, basculeront dans l'intégrisme.

 

Les jeunes sont en main. Nous voilà avertis.

 

 

Reprenons en détail.

 

Dounia Bouzar recueille le témoignage d'un "jeune majeur " qui explique :

"Le problème essentiel avec les travailleurs sociaux (...) c'est leur position vis à vis de l'intégration (...) Ils veulent nous reprogrammer, c'est à dire vider notre disque dur pour le recharger sans trace de notre culture (...)

Lorsque les jeunes (...) se décident à rencontrer un travailleur social, ils doivent d'abord affronter les préjugés avant de pouvoir parler d'être humain à être humain. (...)« Eh bien, qu'est-ce que tu fais, on ne te voit jamais, toujours à la maison, c'est ton père ou tes frères ? Il faut sortir un peu, bouger, profiter... ». (...) une mère d'un certain âge, « enfoulardée », (...) doit d'abord affronter un interrogatoire: « Pourquoi tu portes le foulard ? C'est toi ou ton mari qui veut ? Est-ce que tu es vraiment libre de porter le foulard ? Et sortir ? Tu peux sortir quand tu veux ? » (...) elle rentre chez elle, elle en parle à ses enfants (...) Ils sont écoeurés. (...) ils ont l'impression qu'elle [l'assistante sociale] a essayé de provoquer un conflit dans la cellule familiale, de les diviser entre eux. Lorsqu'elle passe dans la rue, les jeunes lui crient dessus (...)

Au collège du quartier. En plein milieu du ramadan, des affiches de corps nus ont été collées sur les murs du collège, dans le cadre de la campagne de prévention du sida. Comme il existe toute une série d'affiches, le fait d'avoir choisi celles-ci, les plus a osées », justement pendant la période du ramadan, a été considéré comme une provocation par les jeunes musulmans du collège."

 

Pas une seconde, l'idée de dialogue, c'est à dire de discussion des points soulevés sur la liberté individuelle, sur la prévention du sida, n'apparaît dans l'histoire telle que ce jeune homme la raconte. Il n'en ressort qu'une paranoïa : "ils veulent nous diviser, nous provoquer ..."

 

Dounia Bouzar présente les travailleurs sociaux non musulmans comme très ignorants et emplis de préjugés. Les exemples qu'elle prend laissent paraître chez des jeunes issus de l'immigration dont elle parle, un (comment dire ?) rejet de la France ...

 

Ainsi elle rapporte le témoignage d'une jeune fille battue par son frère : " Mes éducateurs (...) me disaient qu'ils ne pouvaient rien faire. Lorsqu'ils sont finalement intervenus, cela a été pour dire à mon frère qu'« en France, il était interdit de battre une femme ». Ça laissait planer un doute sur la loi de notre pays d'origine. Comme si, chez nous, c'était quelque chose de normal. Cela a renforcé mon frère dans sa violence, car ça revenait à lui dire que les Français ne battaient pas les femmes. Et lui, justement, il voulait montrer qu'il n'était pas un Français qui se laissait faire mais qu'il était un Arabe qui commandait. Donc, dans sa mentalité à lui, ça lui donnait raison."

Selon Dounia Bouzar : " C'est leur représentation d'une « violence culturelle » qui a orienté l'intervention des éducateurs : au lieu de faire le point sur les interactions familiales afin de chercher et de trouver une explication à cette violence, comme ils l'auraient fait dans toute autre famille, la seule solution possible leur a semblé être la mise à l'écart de la jeune fille. Dans d'autres cas, lorsqu'il s'agit d'un père violent, il arrive que certains éducateurs soient plus tolérants s'il est maghrébin, parce qu'ils sont persuadés que sa culture lui donne le droit de recourir à la violence et qu'une intervention extérieure lui enlèverait toute autorité."

 

On s'étonne de ce jugement si rapide : le problème n'est-il pas plutôt de faire la part, au cas par cas, du rapport de l'entourage avec la violence, sans préjugé certes, mais sans censurer aucune question : serait il interdit d'imaginer une différence "culturelle" par rapport à la violence ?

Dounia Bouzar cite elle mêmes ces propos de jeunes :  "dans notre religion, l'homme est le chef parce qu'il ramène l'argent, comme il n'en ramène presque pas, il m'enferme, comme ça, il croit qu'il commande encore...". Ignore-t-elle que cette idée sort tout droit du coran (référence : sourate IV-34)? Elle rapporte encore : "Chez nous il n'y a pas de majorité", idée elle aussi tirée de l'idée de consensus chez les savants... Bref, lui apparait-il impensable que les hommes de la famille aient lu le verset sur la correction des femmes ?

De plus, la jeune fille décrit elle même un frère fermé à toute influence "française", et cependant, Dounia Bouzar n'impute le découragement des éducateurs qu'à leurs préjugés... 

 

Dounia Bouzar parle encore de jeunes qui "s'imaginent être des voyous « de naissance » : lorsqu'ils parlent d'un copain délinquant dit Français « de souche », ils clament haut et fort: « Il est comme nous, c'est un Arabe ! »"   Elle décrit les éducateurs comme trop ignorants pour savoir quoi faire "Cet amalgame « arabo-délinquanto-caido » finit de brouiller les repères d'un grand nombre d'éducateurs, qui ne possèdent assez de connaissances ni pour discuter du sens des éléments culturels disparates, ni pour distinguer la part du culturel, du religieux et/ou de la galère. Un jeune Italien qui se prétendrait délinquant de par son origine se verrait facilement contredit par un adulte, lui rappelant l'oeuvre de ses ancêtres. Mais, lorsqu'un jeune d'origine maghrébine dit se comporter en bon descendant d'une lignée de guerriers dominateurs, il ravive des doutes du côté de ses interlocuteurs, qui ne sont plus très sûrs de rien dans ce contexte professionnel difficile et dans une période de politique internationale inquiétante."

On a envie de lui demander d'où vient à ce jeune, selon elle, cette identification à l'image d'une "lignée de guerriers dominateurs", la réponse éclairerait sans doute les éducateurs sur la manière de répondre à ces propos.

 

Le moins que l'on puisse dire est que l'analyse de Dounia Bouzar participe de cet état d'esprit "paranoïaque", imputant aux éducateurs non musulmans une bonne part de mauvaise volonté, et de comprendre et d'agir.

 

Elle décrit les familles comme déficientes : " Combien de pères mettent chaque centime de côté, privant leurs enfants en France de l'essentiel, pour acheter à chacun une maison sur la terre du pays d'origine ?"

Effectivement, on a envie de lui demander ce qui lui permet de porter des accusations si graves (priver des enfants de l'essentiel) contre "combien ?" de gens.

 

Elle explique que les familles s'attachent à des traditions par attachement au pays d'origine, alors que s'ils se conformaient à la religion, ils pourraient prendre des décisions bonnes pour leurs enfants : "La fidélité au pays d'origine devient le principe premier sur lequel toutes les décisions s'appuient. Les exemples d'attitudes rigides ne manquent pas. Une confusion se produit entre ce qui vient de la religion et ce qui vient de la tradition. Tout est prétexte pour enfermer moralement le jeune : des vêtements aux fréquentations, en passant par l'alimentation, et même la façon de parler. Un père dira à sa fille qui s'exprime correctement en français: « Alors ça y est, tu te prends pour Françoise ?", nonobstant le fait que l'islam encourage l'apprentissage des langues. Il ne verra pas d'un bon oeil son amitié avec des copines d'une autre origine, surtout des non musulmanes, alors que le Coran pousse à ce type de démarche. Le change­ment de prénom d'un futur gendre nouvellement converti à l'islam sera exigé (adoption d'un prénom arabe), alors que le Prophète a explicitement indiqué le contraire. Les mariages entre Maghrébins qui ne sont pas de la même origine seront refusés: les Marocains ne veulent que d'un(e) Marocain(e) comme beau-fils (ou belle-fille), et les Algériens que d'un(e) Algérien(ne). Pourtant, il n'y a aucun critère « ethnique » dans la conception du mariage musulman."

 

La solution est apportée selon Dounia Bouzar par les prédicateurs :

 " Les connaissances islamiques acquises avec les prédicateurs vont servir d'outils aux jeunes pour établir les bases d'un dialogue familial (...) en démontrant à leurs parents que la plupart de leurs croyances relèvent des traditions et non de la religion. (...) les parents (...) vont souvent obtempérer, tout simplement parce qu'ils ne sont plus avec les prédicateurs dans un rapport de forces aussi important qu'avec des intervenants extérieurs. La suspicion a également disparu : les parents ne peuvent soupçonner les prédicateurs de vouloir les « séparer » de leurs enfants."

 

Dounia Bouzar donne d'autres citations montrant que toute option "ne respectant pas les racines" et/ou par la religion est vouée à l'échec.

Elle cite un juge des enfants " Comment les enfants des émigrés peuvent-ils légi timer leurs parents qui, eux, ont, d'une certaine façon, trahi leur pays, même s'ils étaient obligés de le faire: quelle leçon as-tu à me donner pour mon intégration, toi qui n'as pas respecté tes racines ?"

Elle cite Hassan Iquioussen : " La fracture que je ressens toujours chez les jeunes, c'est qu'à un moment donné on leur a fait croire que, pour s'intégrer, il fallait se désintégrer. Les jeunes essayent soit de renier leurs origines en se faisant passer pour des Gaulois bien que ces derniers leur fassent sentir qu'ils ne le seront jamais, soit ils essayent de ressembler à leurs parents, ce qui est vraiment impossible car ils ont acquis une autre culture. Parce qu'il est tenu par quelqu'un qui leur ressemble, un sentiment de fierté émane de notre discours, guérissant ainsi leurs complexes."

 

L'option " je suis fière de moi, je ne renie pas mes origines, ET je suis français-e, vivant selon les principes de la République, (et j'en suis fièr-e) " ne parait pas ouverte. La réponse est donc apportée par les religieux, d'une bien étrange façon.

 

Dounia Bouzar explique ainsi pourquoi Hassan Iquioussen dit : "« Celui qui n'a pas peur de Dieu fera tout et n'importe quoi, même si vous avez des belles lois, même si vous avez un bon enseignement à l'école.(...)» Les prédicateurs tentent ici de combattre l'aspect impersonnel du texte de loi écrit par des humains, que l'on peut donc facilement transgresser, et dont l'irrespect peut même signifier le refus du système.

Elle cite un jeune : "Dieu, c'est pire que les keufs, il est tout le temps sur ton dos. (...). Et puis je suis devenu cool, parce que je sais que ce qu'je rate ici, Allah me le donnera dans l'autre vie. Ça motive."

 

On a envie de lui demander s'il est possible d'envisager (un seul instant !) de parler aux jeunes de leur conscience, de leurs devoirs moraux envers autrui, de leur expliquer que la loi n'est pas l'incarnation du "système" mais des devoirs envers les autres, d'envisager de les faire agir en fonction de leur propre conscience et non de la crainte d'un dieu .. ?  Serait-ce trop "occidental" pour être explicable à des jeunes "beurs" ?

 

Dounia Bouzar explique encore que les prédicateurs jouent sur le ressort de "l'honneur", du "regard du groupe" :

" Hassan lquioussen tente de remettre en place la régulation collective qui existait auparavant dans les pays d'origine, mais aussi dans les cités minières ou ouvrières françaises. Pour cela, il sensibilise les jeunes au respect du groupe et à la régulation collective basée sur l'honneur que cela entraîne. Cet honneur est présenté comme la richesse symbolique du groupe familial: chaque membre de la famille en possède une part qu'il met en jeu dans son comportement individuel, honorant ou déshonorant le groupe tout entier. La transgression de la loi par un fils ou une fille atteint l'honneur de la famille et remet en cause son appartenance au groupe, lequel exerce un fort contrôle social sur chacun d'eux. Cela semble être le dernier recours pour sensibiliser le jeune au respect de la loi: "Parce que le Prophète (Que le salut soit sur lui) dit: "Celui qui n'aura pas de honte, celui qui ne se souciera pas de ce que les gens vont dire de lui, celui-là, il fera n'importe quoi, la pire des choses." Si tu n'as pas de honte, de pudeur, de retenue, tu feras n'importe quoi. Nos parents disent toujours hachera  et c'est vrai, celui qui a honte, qui a peur de ce qu'on va dire de lui, évite de faire le mal. C'est pour cela que celui qui n'a pas peur du regard de Dieu, qu'il ait peur du regard des gens"."

 

Le dernier recours pour enseigner le respect de la loi, serait de faire régresser au stade de la responsabilité collective, de la notion dangereuse d'honneur collectif , de faire miroiter le menace de la sanction du groupe ? C'est là toute l'ambition que la France devrait avoir pour ses jeunes, en les laissant entre les mains de ce genre de prêcheurs ?!

Pour les filles aussi, bien évidemment, la religion est la solution selon Dounia Bouzar :

"La religion prônée ici leur permet de revendiquer leurs droits vis-à-vis de leurs familles ancrées dans des traditions machistes. Leur entrée dans la religion change leur vie face à des grands frères qui exerçaient un contrôle accru alors qu'ils étaient loin d'être irréprochables, elles sont en position forte puisqu'elles sont devenues pratiquantes. Si cela n'est pas suffisant pour imposer le respect, elles bénéficient du réseau de soutien des religieux qui peuvent intervenir, comme nous l'avons vu dans l'exemple ci-dessus. Enfin, le voile leur donne une liberté de mouvement non négligeable. En effet, celui-ci les protégeant des éventuelles agressions ou tentatives de séduction, les parents n'ont plus peur de les voir rentrer par le dernier métro de la bibliothèque universitaire. (...) Contrairement à ce qui a pu être dit parfois, le voile ne constitue pas en lui-même un moyen d'émancipation de par la liberté d'espace auquel il donne droit. C'est l'entrée dans l'islam, en ouvrant un débat sur leurs conditions de vie, comme nous venons de le voir, qui favorise l'émancipation familiale, et par conséquent sociale. On comprend mieux alors comment le voile symbolise, pour ces jeunes filles vivant en France, leur relation avec un Dieu créateur de liberté, (...)"

 

Dounia Bouzar ne parle pas d'émancipation par une action pour changer la mentalité des frères, pour modifier les traditions autrement qu'avec les arguments de la religion. Ces options là disparaissent du champs de la pensée. Elle nous excusera d'oser encore y songer, de nous souvenir que c'est contre la religion et contre les traditions, que les femmes ont revendiqué l'égalité ici - et ailleurs - , de constater que beaucoup de filles sont parvenues à inspirer confiance aux parents sans le voile.

 

Impossible de défendre des droits individuels, car la famille le vivrait comme une agression colonialiste, et l'attitude émancipée du ou de la jeune, comme une trahison, et Dounia Bouzar n'envisage pas un seul instant l'option de tenter de dialoguer avec la famille, pour analyser cette impression, faire évoluer les idées ... :

" Notre intervention [ Dounia Bouzar s'inclue dans le nous en tant qu'éducatrice] centrée sur l'autonomie du jeune provoque alors - de façon paradoxale - l'inverse du but recherché. En effet, la famille peut vivre notre approche comme une imposition culturelle, survivance du colonialisme, signifiant que l'objectif de socialisation de leur enfant ne s'obtiendra que par l'acquisition de valeurs indivi­duelles occidentales. Par ailleurs, elle peut interpréter notre position comme une ingérence destinée à « diviser pour mieux régner », puisque celle-ci remet en question le fonctionnement clanique. La famille va alors se souder. Le repli sur soi devient le symptôme d'une crainte ressentie et renforce sa capacité de résistance. Toute prise de distance de l'un des membres est alors vécue - encore plus intensivement qu'auparavant - comme une trahison par rapport au groupe, alors que l'objectif était au contraire de permettre au jeune de trouver son équi­libre au sein de son histoire de vie".

 

On pourrait résumer ainsi le raisonnement de Dounia Bouzar : Puisqu'on ne veut pas sortir de soi, la seule solution est d'y rester - puisqu'on se sort pas de soi , on ne sort pas de soi, comme dirait monsieur de la Palisse.

 

Quant à remettre en cause le port du voile au nom de sa récupération par les intégristes, que l'on n'y songe même pas, on précipiterait les jeunes dans l'intégrisme : "Le choix entre l'assignation à l'assimilation et l'assignation à l'intégrisme peut alors les amener à intérioriser le stigmate et à le revendiquer en tant que valeur constitutive. En d'autres termes, si le moindre signe visible - tenue vestimentaire, par exemple - est interprété comme de l'intégrisme, le jeune, en réaction à cette stigmatisa­tion, ne verra d'autre issue que de la renforcer."

 

Ce qu'elle relève de maladresse et de brutalité dans certaines réactions de "travailleurs sociaux" est juste, mais d'une part, elle ne donne que cette image là des travailleurs sociaux, ce qui parait être une généralisation abusive, et d'autre part, la réponse qu'elle propose, la religion comme seul recours, est fausse.

Le livre de Dounia Bouzar parait se situer dans l'univers de la pensée islamiste, dans le sens de soumission au Coran. En effet, lorsqu'une solution pour sortir d'un problème familial marche, elle nous explique que cette solution est conforme à la religion. On peut même en conclure ( ce qu'elle ne fait pas), qu'elle fonctionne parce qu'elle conforme au Coran. Par contre elle nous explique que toute solution contraire au Coran est vouée à l'échec. On peut dire que la conclusion parait claire (même si elle-même ne la pose pas, et que donc on ne peut pas exclure l'hypothèse qu'elle en tirerait une autre) : le travail social envers les enfants d'immigrés doit être conforme au Coran pour réussir.

 

L'idée qu'il serait possible de faire appel à l'intelligence des jeunes, de les éveiller à la conscience politique, au sens des responsabilités politiques d'un-e citoyen-ne, ne semble même pas imaginable dans les propos de Dounia Bouzar.  Une idée qui parait ici relever de la septième dimension...

Ce serait pourtant la moindre des marques de respect, la moindre des responsabilités de l'Etat, de notre société d'adulte, envers ces jeunes, et envers leurs familles.

 



[1]  Editions Syros 2001